par Patrice Bonafonte
Philatélie et entomologie sont toutes deux de
grands champs d'études à multiples facettes. Pour ceux qui ont un
double penchant entomologique et philatélique, la combinaison des deux
occupations en "entomophilatélie" peut être un violon
d'Ingres très enrichissant et très éducatif. Cependant, que peut-on
inclure dans un court traitement du sujet ?
Évidemment, les insectes sont présents depuis
beaucoup plus longtemps que les timbres-poste, mais les deux ont été
insultés et révérés par l'humanité. J'ai décidé de me focaliser
sur ces deux extrêmes (par exemple les insectes utiles et les insectes
nuisibles) sur timbres-poste.
Mais auparavant, toutefois, je voudrais dire
quelques mots à propos des timbres d'insectes et de la collection thématique
de timbres.
Si l'on parcourt les pages d'un catalogue de
timbres, il apparaît assez rapidement que les insectes (et surtout les
papillons !) sont un thème populaire. A peu près tous les pays ont émis
des timbres représentant des insectes (même si c'est dans une optique
purement commerciale ayant pour cible principale les collectionneurs
thématistes,
et trop souvent sans aucun rapport avec les espèces vivant dans ces mêmes
pays). A la date de 1990, 300 pays indépendants ou autres subdivisions
politiques ont émis environ 5000 timbres représentant plus de 1700 espèces
d'insectes appartenant à 14 ordres différents, plus tout ce qui a été
émis depuis…
Le premier timbre d'insecte a été émis en 1891
par le Nicaragua et représente une ruche faisant partie d'une scène
symbolisant la productivité et la fertilité. Le premier coléoptère
sur timbre a été le lucane Chiasognathus
grantii, émis en 1948 par le Chili dans une série en hommage au
naturaliste français Claude Gay. Cette
série comprenait aussi une mante (Mantis
gayi) et un papillon (Castnia
eudesmia).


Depuis, les timbres d'insectes ont considérablement augmenté
en fréquence, certainement pour les raisons citées plus haut : cibler
les entomophilatélistes essentiellement.
La variété des sujets entomologiques sur les timbres-poste est
incroyable. Bien sûr, les espèces voyantes et colorées prédominent,
dans la mesure où la plupart de ces timbres sont émis, comme indiqué
ci-dessus, avec le collectionneur en ligne de mire. On trouve les extrêmes
en exactitude scientifique des noms, exactitude des représentations, et
dans la valeur esthétique globale. Les insectes sur certains timbres
sont un tout petit peu plus que des caricatures, alors que d'autres sont
de vraies œuvres d'art.


Comme indiqué précédemment, les insectes
ont à la fois fasciné et terrifié depuis des milliers d'années. Cela
n'a pas échappé aux concepteurs de timbres-poste, qui ont jugé les
insectes dignes de jouer un rôle important en tant que sujets de
timbres. Bien que la majorité des espèces d'insectes ne soit pas
directement utile ou nuisible (d'un point de vue humain), il y en a
quelques-unes unes qui tombent dans l'une ou l'autre ces deux catégories.
Pour la suite de cet article, je vais mettre en scène quelques-uns uns
de ces utiles ou nuisibles du monde entomologique, tels qu'ils ont dépeints
sur les timbres. Bien naturellement, étant donné la richesse de
l'iconographie, ce ne sera qu'un survol rapide de ce qui existe.
Les insectes nuisibles ont fait leur chemin parmi
les timbres ; la majorité d'entre eux sont des ravageurs des cultures,
des arbres, et d'autres denrées humaines. Mais une sous-thématique
importante peut également être entreprise si l'on s'intéresse à la
malaria, même si les espèces représentées sont en tout petit nombre
(Anopheles).
Le criocère de l'asperge (Crioceris
asparagi) de Madagascar (1993) fait partie d'une série de coléoptères
dont aucun n'est originaire de Madagascar. 

Le criquet migrateur a été et reste toujours un fléau en Afrique ; en
1964, le Mali a émis une série de trois timbres sur le thème
"guerre au criquet". La valeur 5 F montre une carte d'Afrique
avec l'aire d'invasion du criquet migrateur de 1928 à 1942.
En 1967, l'Autriche a émis un timbre commémorant le 6ème
Congrès International de Protection des Plantes, montrant un doryphore.
Mais six autres pays ont illustré cette espèce, notamment la Turquie
qui a émis en 1982 et 1983 deux séries de timbres sur les insectes
nuisibles.

Le dernier exemple d'insecte nuisible
est d'Iran, d'une série de deux timbres dédiée à la lutte contre les
insectes nuisibles. Le timbre illustré montre un scolyte (Scolytus
scolytus), l'autre représentant une sauterelle.

Alors que l'humanité est
constamment en guerre contre des insectes nuisibles nombreux et variés,
quelques espèces sont hautement appréciées. L'abeille domestique,
Apis spp., est appréciée non seulement pour sa production de miel,
mais aussi pour son rôle pollinisateur et, également, pour ses
comportement et développement complexes et intriguants. Le fait que cet
insecte soit tenu en si haute estime est mis en évidence par le nombre
de timbres dépeignant les abeilles ou l'apiculture. De nombreux pays
ont dédié un timbre ou une série entière à l'abeille, et de
nombreux collectionneurs en ont fait une thématique à part entière.
Apimondia est la Fédération
Internationale des Associations d'Apiculteurs, et tous les deux ans un
congrès sur l'apiculture se tient dans un pays hôte, à travers le
monde entier. Plusieurs de ces nations hôtes, y compris la Hongrie
(1983), le Japon (1985), la Pologne (1987), la Chine (1993), la Belgique
(1997), etc., ont émis des timbres pour commémorer à la fois
l'abeille et leur accueil du congrès Apimondia. Ci-après les timbres
Apimondia de Pologne et d'Union Soviétique.
Le timbre de Tanzanie (1986) montre
des ouvrières accomplissant une de leurs tâches les plus importantes :
la pollinisation.

Le deuxième groupe le plus
populaire parmi les insectes utiles sur timbre est celui des
coccinelles. Ces insectes sont reconnus comme des prédateurs très
actifs de nombreux insectes nuisibles, et sont même le sujet de
nombreuses comptines ou de folklore. Naturellement, ce sont de bons
sujets pour les timbres, ne serait-ce que pour leur coloration théâtrale.
Les coccinelles ont été utilisées intensivement en lutte biologique
à travers le monde entier, comme le montrent les exemples suivants.
Le timbre de Mauritanie (1969) montre Chilocorus
bipustulatus utilisée pour lutter contre la cochenille du
palmier-dattier Parlatoria
blanchardi. Celui de
Turquie (1980) montre Rodalia
cardinalis, utilisée pour lutter contre la cochenille Icerya
purchasi, sur agrumes entre autres.


Trois des exemples suivants montrent
Coccinella septempunctata,
introduite dans divers pays. Cette espèce a été montrée sur 24
timbres différents appartenant à 23 pays différents, dont la Chine
(1992), le Congo (1994) ou le
Danemark (1998).


L'émission d'Argentine
fait partie d'une série de cinq valeurs dédiée aux insectes, deux
d'entre eux étant des coccinelles (Hippodamia
convergens et Adalia
bipunctata), avec deux punaises (Podisus
nigrispinus et Calleida
suturalis) et un carabique (Nabis
punctipennis).

Anatis
mali, décrite sur l'émission des Etats-Unis de 1999, fait partie
d'une fantastique série de 20 timbres, réalisés par ordinateur, et
montrant divers insectes et arachnides. Ces timbres sont uniques pour le
moment (au moins parmi le monde des timbres d'insectes), en ce que
chaque timbre comporte au dos une brève description de l'espèce, ce
qui fait que lécher la gomme peut être une expérience pédagogique !

Des timbres ont été émis pour
commémorer des espèces d'insectes utiles, pour nous sensibiliser aux
luttes contre les espèces nuisibles, pour attirer l'attention sur la nécessité
de protéger les espèces en danger, ou plus simplement pour dépeindre
les formes et les couleurs étonnantes et variées des insectes. Je
trouve que la collection de timbres d'insectes (et plus particulièrement
de timbres de coléoptères qui est ma thématique) est une passion très
enrichissante, et je continue à être émerveillé par le nombre et la
variété de ces timbres.
La tâche de rassembler ne serait ce
que la plupart de ces émissions n'est pas facile, mais il existe de
nombreuses et importantes sources d'information qui peuvent aider. Il
existe plusieurs catalogues mondiaux différents, les plus connus étant
Michel, Scott, Stanley Gibbons et Yvert & Tellier. C'est sans aucun
doute un endroit où débuter, et bien que généralement relativement
chers, ils peuvent être trouvés facilement. On peut aussi utiliser les
catalogues spécialisés, encore que la dernière édition du seul
existant encore aujourd'hui date de 1996 (DOMFIL. Butterflies and
other Insects). Un abonnement à un bulletin des nouveautés permet
ensuite de se tenir à jour (par exemple le Bulletin Mensuel Théodore
CHAMPION pour la mise à jour du catalogue Yvert et Tellier).
Il y a également des centaines de
pages sur Internet dédiées à la philatélie en général, mais peu de
sites dédiés spécifiquement aux insectes sur timbres. On trouvera
ci-après dans la section "Liens Internet" quelques adresses.
Il faut par contre comprendre l'anglais, et même un peu de japonais est
un plus pour deux sites…
Remerciements
Cet
article est une traduction et une interprétation d'un article de mon
ami Darren POLLOCK, publié dans plusieurs revues entomologiques ou
philatéliques (voir première publication dans la bibliographie). Il
m'a aimablement autorisé à copier, traduire et adapter cet article.
Qu'il en soit ici remercié. Pour information, Darren est un
entomologiste qui a travaillé auparavant au Canada sur les Ténébrionides,
et maintenant au Texas sur les Coccinellides. Darren fait également
collection des timbres sur les Coléoptères.
Patrice Bonafonte
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